Dans son livre l »Art invisible », Scott Mc Cloud accorde l’un de ses chapitres à la relation qu’entretiennent l’image et le texte à travers les siècles, dans l’art et la littérature. Je trouve sa vision assez originale, je vais essayer de faire court pour la synthétiser…
A l’aube de l’humanité, le dessin précède l’écriture ( peintures rupestres).
Les premiers modes d’écriture à apparaître reposent sur la base de dessins stylisés ( hiéroglyphes, idéogrammes…) qui deviendront, par couches successives d’abstraction et de stylisation, des lettres.
Jusqu’au 19e siècle environ, le fossé entre écriture et image n’aura de cesse de se creuser, la peinture devenant de plus en plus figurative, et l’écriture comportant de moins en moins d’illustration. Chacun s’occupe d’un domaine bien distinct:
-la peinture, occupée par le domaine des choses visibles ( portraits, paysage, travail de la lumière, des couleurs…) et des émotions;
-et l’écriture, véhicule des idées et des savoirs.
Ce qui est intéressant, c’est qu’à partir du 19e, avec la généralisation de la photographie et l’affranchissement des artistes de la tentation de vouloir représenter le réel ( puisque la photo le fait mieux qu’eux, plus rapidement et à moindre coût), les peintres vont explorer de nouvelles pistes: les pionniers seront les impressionnistes, puis il y aura le dadaïsme, le fauvisme, le cubisme, l’expressionisme… jusqu’à arriver à un degré d’abstraction ne cherchant ni ressemblance, ni signification extérieure.
Au même moment où le texte, se libérant peu à peu des rigidités de structures de la littérature classique, évolue vers un style plus classique et familier, la prose permettant un échange plus direct avec le lecteur. Les écrivains, comme les peintres, se permettent des errances, des tests, s’amusent avec les mots ( voir l’OUBAPO).
Alors, les images allant de plus en plus vers l’abstraction, et les lettres de plus en plus vers le pictural, il s’en suivit une sorte de « collision »!

… Et aujourd’hui encore, près de 90 ans après la sortie de cette affiche, les graphistes continuent de travailler les lettres comme éléments plastiques dans des compositions souvent très inspirées!